Rena Stère - Qwice

Chapitre 10

Rena Stère - Qwice 2025

Chapitre 10 Chapitre 10<hr />Les semaines défilent et le mois de mars commence à montrer le bout de son nez. Félicien entame sa soupe, sans sentir la moindre irritation dans sa gorge. La guérison a été plus rapide que prévu, il ne lui aura fallu que trois mois pour s'en remettre. Ce temps libre lui a permis de faire des cours de lecture à sa domestique et cette dernière s'est impliquée à cette tâche sans rechigner. Efficace, appliquée, son élève réussit à lire d'une manière correcte, même si elle prend encore un drôle d'accent à la lecture. Il l'observe étudier, en s'abreuvant de son thé, et Marianne lève le nez de son conte.— Monsieur, interpelle-t-elle, en tournant son livre de manière à pouvoir montrer le texte. Que signifie ce mot ?Elle montre du doigt une phrase « Ils allèrent récupérer des étoiles à la surface, pour pouvoir récupérer l'espoir qui leur est dû. » Plus particulièrement sur « espoir ».— Espoir ? C'est difficile à l'expliquer, mais c'est la lumière au bout du tunnel, c'est le fait d'espérer qu'une situation s'améliore.— Oh, je vois, c'est de là que vient « espérer ».Marianne reprend sa lecture, sans se lasser de ce texte qu'elle a lu et relu plusieurs fois. Son maître se demande comment elle parvient à ne pas s'ennuyer, car même son coup de cœur littéraire finirait par l'ennuyer au bout de trois lectures consécutives. Il aurait bien voulu lui proposer autre chose, mais Raphaël n'a trouvé aucun livre dans ce format traduit et les autres ouvrages, autres que les contes pour enfants, sont beaucoup trop inaccessibles encore, à cause de la typographie illisible ou trop petite.— C'est dommage que nous n'ayons pas d'autre livre pour que vous puissiez les lire, déplore Félicien, en posant sa tasse vide.— Ne vous en faites pas, j'aime beaucoup cette histoire, je la trouve très belle.— Vous trouvez ? Je pourrai aller acheter des livres, si vous le souhaitez.— Oh non, non, j'insiste, je préfère celle-là, assure son élève. Je la trouve douce et réconfortante.— Je vois, j'ignorais que vous seriez aussi friande de ce genre de récit.— C'est vrai, j'aime beaucoup les contes de fées, admet Marianne, souriante. Et vous, Monsieur, quel genre de livre appréciez-vous lire ?Félicien s'accoude sur la table. Il se demande comment il pourrait expliquer ses lectures habituelles à une jeune femme qui ignorait encore ce que signifiait « éléphant » ou encore « guerre ». Elle ne risque pas de s'intéresser à ses romans d'auteurs prometteurs.— Mon dernier livre était un Jules Verne, Voyage au centre de la Terre.— Oh, ça m'a l'air d'être une histoire fabuleuse, se réjouit-elle, souriante.— Détrompez-vous, ce n'est pas aussi magique que ça en ait l'air. C'est bien plus compliqué et déroutant que le titre puisse faire croire. Mais ça a été une lecture agréable, même si l'idée en elle-même me paraît bien extravagante.— Vous avez l'air de savoir beaucoup de choses.— J'aime beaucoup lire oui, ça a été une de mes occupations majeures, auparavant.— Je comprends, j'ignorai à quel point ça pouvait être passionnant.Félicien pourrait presque se montrer sarcastique, vis-à-vis de ce comportement enfantin, mais en réalité, il l'envie d'avoir le privilège de pouvoir lire beaucoup de bons livres dans le futur. Marianne s'apprêtait à reprendre sa lecture, avant que le bruit de l'horloge ne lui rappelle le temps qui passe, et surtout qu'elle travaille en tant que domestique dans ce manoir. Surprise, elle pose son livre sur la table et se lève précipitamment.— Oh pardon, j'ai failli oublier de vous débarrasser la table. Je m'en occupe tout de suite.Son maître aurait voulu lui dire de ne pas se presser, mais Marianne s'est déjà emparé de son plateau et quitte la chambre, en dévalant presque les escaliers, des bruits que le jeune homme entend depuis la chambre. C'est l'une des rares fois où Félicien la voit aussi agitée, mais il la préfère ainsi qu'apathique. Ce dernier jette un coup d'œil par la fenêtre, le ciel est bien dégagé, avec un bleu resplendissant et le paysage retrouve ses couleurs sans une trace de neige à l'horizon. Avec le temps qui s'est réchauffé, Félicien se surprend à vouloir se promener autour du lac, alors que ça n'a jamais été le cas auparavant et qu'il rechignait même à l'idée de poser un pied dehors. Une envie dont il fait part, au retour de sa domestique.— Marianne.— Oui, Monsieur ? Vous avez besoin de quelque chose ? questionne-t-elle, en refermant la porte derrière elle.— Pourrions-nous marcher dehors ?Comme escompté, son interlocutrice ne paraît pas enthousiasmée à cette idée. Il s'y attendait, sa santé fragile ne lui permet pas d'accéder à des coups de folie, surtout qu'il n'est pas tout à fait guéri et que ses domestiques ne souhaitent pas avoir de rechute de sa part. Marianne s'approche de son lit pour pouvoir poser sa main sur son front et bel et bien constater qu'il vaudrait mieux ne pas faire ça. Alors au lieu de refuser, la jeune femme formule sa réponse différemment.— Je pense qu'il vaudrait mieux attendre encore quelques jours pour qu'on puisse aller marcher dehors. Il fera plus beau, de plus.— Je comprends. J'attendrai, dans ce cas.— Par contre, je pense que vous pourriez prendre un bain, cela pourrait vous faire du bien de vous laver dans de l'eau chaude.Félicien n'a jamais apprécié se laver dans la bassine, mais pour cette fois, il va le tolérer. Ça changera de son quotidien ou encore de la toilette dans son lit.— Très bien, alors préparez la bassine dans une heure.— D'accord, je préparerai tout le matériel d'ici là.Couché dans son lit, le jeune homme laisse ses paupières se fermer. Entrant dans un état de somnolence sans succomber au sommeil, Félicien peut entendre sa domestique tourner les pages et marmonner quelques mots durant sa lecture. Ces simples paroles se transforment en une berceuse à ses oreilles et il en tire un réconfort insoupçonné. Ça fait bien longtemps qu'il ne s'était pas senti à l'aise pendant une sieste, il pourrait presque revivre son enfance paisible. Lorsque ce demi-rêve prend fin, le jeune homme ouvre les yeux et constate que sa domestique prépare la grande bassine, avant de quitter la chambre, certainement pour aller chercher de l'eau chaude. À son retour, munie de ses deux grands seaux d'eau, Marianne aperçoit son maître assis au bord du lit, en train de se déboutonner le haut de la chemise.— Pardon, est-ce que je vous aurai réveillé ?— Non, je ne dormais pas, avant votre arrivée, la rassure-t-il, sur un ton neutre.— D'accord, tant mieux alors.Sa domestique remplit la grande bassine d'eau chaude et alimente le poêle de la chambre pour que l'air ambiant reste tiède. Après avoir tout mis en place, elle montre son dos à son maître pour qu'il puisse se déshabiller. Ce dernier pose le pyjama usé sur son lit et s'installe dans la bassine. Marianne se déplace dans la pièce de manière à ne pas croiser son regard et s'assoit sur sa chaise, dos à lui.— Est-ce que vous auriez besoin d'une quelconque aide, Monsieur ? questionne-t-elle, en récupérant son livre de la table.— Je vous int