ArganReebz - Qwice

Pour fêter l'arrivée de l'automne, laissez-moi vous présenter un petit texte que j'avais écrit il y a environ trois ans. J'espère qu'il vous plaira, j'en suis toujours un

ArganReebz - Qwice 2024

Pour fêter l'arrivée de l'automne, laissez-moi vous présenter un petit texte que j'avais écrit il y a environ trois ans. J'espère qu'il vous plaira, j'en suis toujours un peu fière en tout cas 😄🍁 <p><span style="color:rgb(255,140,0);">Cadavre d’Automne</span></p><p style="text-align:left;"><span style="color:rgb(255,140,0);">Mon cadavre pourrait passer juste sous votre nez, vous ne feriez toujours pas attention à moi. Pourtant, je suis jolie, bien que semblable à nombres de mes sœurs parties trop tôt, et bien qu’il serait particulièrement effronté de ma part de me comparer à une fleur, je me trouve plutôt colorée pour quelqu’un qui assiste chaque jour à un nouvel enterrement. Oh, je ne suis pas humaine, mais j’ai un projet de vie : je veux voler sans jamais retomber, fuir cette existence monotone dont le seul but est de rester accrochée aux branches d’un arbre qui n’attend que l’hiver pour jouer aux exhibitionniste devant les promeneurs aux mains gelées. Les arbres ont trop chaud quand nous sommes là, ils râlent sur tout le monde ; pour se venger mon peuple appelle les moustiques et invoque la famille de pigeons, puis certaines feuilles vont manifester et lâchent leur branche sans raison, alors l’arbre se tait, bien content d’avoir perdu des feuilles en trop. </span></p><p style="text-align:justify;"><span style="color:rgb(255,140,0);">Un jour, ma famille mourra mais ça ne me rend pas vraiment triste. Je ne sais pas si je suis censée éprouver des sentiments ou même réfléchir sur ma condition, ni même si je devrais cesser de taillader sur mon corps tous ces mots que j’aimerais dire, dans l’espoir qu’un jour, l’homme qui, l’homme qui ramassera mon cadavre pour le mettre dans son feu soit arrêté par son enfant qui lui, aura remarqué cette pauvre plainte qui résume ma vie de végétal dépressif.</span></p><p style="text-align:left;"><span style="color:rgb(255,140,0);">Cependant, je me fais pas d’illusion : il est fort possible que personne ne me ramasse, que je reste sur le sol meuble de la forêt,  à pourrir pendant quelques années jusqu’à me transformer peu à peu en terre, qui servira pour le potager de la famille humaine dont la ferme est juste à côté et qui vient parfois cueillir des champignons.  Je ne sais pas si j’aurais aimé être un champignon : beaucoup d’entre eux souffrent de leur condition, certains attendent patiemment le jour où ils seront dégustés tandis que d’autres craignent une future relation toxique ou des crachats d’acides. Parfois, des messieurs viennent avec leurs chiens sous un chêne, ils creusent et j’entends parfois des cris de joies. Si seulement un jour, on pouvait m’accueillir de cette façon !  Les truffes n’ont qu’à dormir bien cachées dans leur hôtel de terre, à l’abri du froid. Elles ne connaissent pas la dure vie de l’extérieur, la chute qui nous attend chaque seconde, la mort à portée de vent. Parfois, un élégant asticot serveur doit venir leur apporter une coupe de champagne de fourmi  ou peut-être même des œufs de cigales. Paraît que ces gens-là ont des goûts de luxe. </span></p><p style="text-align:justify;"><span style="color:rgb(255,140,0);">Du haut de notre arbratement,  nous pauvres mortels attendons le jugement suprême de notre dieu le Vent, cet abruti sans pitié qui pique les yeux des hommes  et nous fait porter le deuil de toutes ces malheureuses qui s’envolent vers leur mort assurée. Et c’est ainsi que commence leur calvaire, privées de leur altitude, les pauvres ne peuvent plus bouger, et brisées sous les cruelles chaussures, les feuilles se mettent à hurler.</span></p>

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