Conseil de lecture : « Le Ku Klux Klan » de Farid Ameur. <p>Farid Ameur est historien, spécialiste en histoire des États-Unis au XIXe siècle. Dans ce livre, il retrace l'histoire du Ku Klux Klan de 1866 - lendemain de la Guerre de Sécession - à nos jours. Il nous explique l'évolution <span style="color:rgb(231,233,234);">de cette organisation complexe</span>, à cheval entre terrorisme et lobbyisme, qui devient une organisation de masse dans les années 20.</p><p>Dans ces évolutions, il distingue bien évidemment les trois périodes du KKK. La première est celle du premier Klan, de 1866 à la fin du XIXe siècle. Ses sujets principaux sont la « revanche du Sud » avec l'espoir d'une nouvelle guerre pour défendre l'autonomie des États face au gouvernement fédéral, et le militantisme pour l'établissement de lois ségrégationnistes. C'est ce sur quoi ils obtiennent gain de cause au fil des années.</p><p>Vient ensuite le second Klan, en 1915, qui est une organisation déclarée. Mais toute aussi violente. Elle élargit ses sujets au-delà de la question de la suprématie blanche — qui reste son sujet n°1 malgré tout — et de la mémoire sudiste : militantisme anti-alcool, homophobie, anticatholicisme, antisémitisme, antiféminisme, anticommunisme, attaques contre les grévistes, œuvres de charité, etc. L'organisation secrète devient peu à peu une véritable force politique intégrée à droite, avec plusieurs millions d'adhérents, dont des chefs de police, des juges, des officiers, des gouverneurs, des sénateurs et même quelques présidents ! Il existe aussi des sections féminines, alors que le mouvement était autrefois réservé aux hommes. Au cours des années 40, le Klan périclite, miné par de nombreuses affaires de mœurs — des dirigeants vus buvant de l'alcool ou accompagnés de prostituées, des affaires de viol, etc — mais aussi des tensions internes qui mènent à des scissions en tout genre. Le fisc met un coup d'arrêt au Klan avec une liquidation judiciaire pour impôts impayés en 1944.</p><p>Dès 1946, d'anciennes figures du Klan décident de le refonder, mais en différentes associations locales, afin d'en faire une hydre à plusieurs têtes, afin d'empêcher toute liquidation qui stopperait le mouvement net. C'est ce qu'on considère comme la phase du troisième Klan. Cette décentralisation du mouvement rend difficile l'établissement d'une ligne commune, malgré quelques congrès nationaux, et renforce les dissensions internes au mouvement. Certaines Klavernes — nom donné aux sections locales du Klan — se rapprochent davantage du mouvement néonazi et des skinheads, quand d'autres gardent une distance courtoise. Certaines commencent à accepter des catholiques, quand d'autres restent dans un protestantisme intégriste, sans concession. Dans les années 70-80, certaines acceptent des femmes dans les rangs masculins, leur donnant même des grades importants, quand d'autres restent profondément misogynes.</p><p>Encore aujourd'hui, cet « Empire invisible » continue de hanter l'Amérique, avec parfois des actions violentes, voire meurtrières, au nom du Klan, même s'il n'est réduit qu'à une poignée de groupuscules, mêlés à d'autres groupuscules néonazis et libertariens. Le livre de Farid Ameur vous explique en détails ce qui se cache derrière ces cagoules blanches : sociologie des militants, rituels, scandales, débats internes, stratégies politiques. Le tout raconté dans un style journalistique, sans annotations, ce qui le rend simple à lire pour le grand public.</p>