Romain Leclaire - Qwice

Pump.Fun - L'ascension fulgurante d'une plateforme de memecoins

Romain Leclaire - Qwice 2025

Pump.Fun - L'ascension fulgurante d'une plateforme de memecoins Dans l'un des recoins les plus étranges d'Internet se trouve un site où une bannière au style Word Art flotte au-dessus de la page comme un vestige d'une autre époque. Des icônes scintillent, dansent et bondissent, défiant le regard qui tente de les suivre. Des messages à peine lisibles apparaissent en vert, rouge et jaune, avant de s'évanouir. Sous cette explosion de bizarreries se cache l'une des entreprises de cryptomonnaies à la croissance la plus rapide jamais vue, Pump.Fun, une plateforme de lancement de memecoins, ces cryptomonnaies dont la valeur fluctue en fonction de la popularité des mèmes qu'elles référencent.Lancée en janvier 2024, elle aurait généré plus de 350 millions de dollars de revenus en un an, selon des sources tierces, grâce à une commission de 1% sur les transactions. Derrière cette réussite se trouvent trois entrepreneurs d'une vingtaine d'années, Noah Tweedale, Alon Cohen et Dylan Kerler. Le trio a débuté comme traders de memecoins avant de se lasser d'être victimes de "rug pulls", ces arnaques où l'émetteur d'une cryptomonnaie disparaît avec les fonds, laissant les investisseurs avec des jetons sans valeur.<blockquote>"Investir dans les memecoins était très risqué... Tout était conçu pour soutirer de l'argent aux gens", a confié Tweedale lors d'une interview. "L'idée avec Pump était de créer quelque chose où tout le monde serait à égalité."</blockquote>Les trois cofondateurs, qui se sont rencontrés en Angleterre, ont tenté de garder leur identité secrète. Tweedale et Cohen continuent d'utiliser publiquement leurs pseudonymes, Sapijiju et A1on, tandis que Kerler maintient une faible association publique avec Pump.Fun. Leurs noms ont néanmoins émergé l'année dernière dans des documents d'entreprise. La plateforme a révolutionné le marché en rendant possible pour quiconque de lancer instantanément un memecoin, sans frais, grâce à une interface utilisateur simple et une innovation mathématique appelée "courbe de liaison". Elle a également standardisé le code sous-jacent, empêchant les développeurs d'intégrer des mécanismes malveillants pour voler des fonds.Le résultat a été spectaculaire, plus de 5,5 millions de memecoins uniques ont été créés via la plateforme depuis son lancement. Bien que la majorité de ces tokens finissent par ne plus rien valoir, la possibilité de gains démesurés attire particulièrement les jeunes investisseurs, selon Cosmo Jiang de Pantera Capital.<blockquote>"Il y a un changement vers des paris à plus court terme plutôt que des investissements ; les gens veulent réussir en une seule transaction."</blockquote>Malgré son succès financier, Pump.Fun a connu des difficultés, principalement dues à une certaine immaturité opérationnelle. En mai dernier, un employé aurait exploité ses privilèges administratifs pour détourner près de 2 millions de dollars. La plateforme a également dû faire face à des problèmes éthiques, notamment l'impossibilité d'empêcher les "soft rug pulls", où quelqu'un crée un nouveau token, le promeut en ligne, puis vend toutes ses positions, faisant s'effondrer le prix. Le site a récemment suspendu sa fonction de streaming en direct suite à des incidents troublants, certains créateurs de coins diffusant des actes dangereux ou dégradants pour attirer l'attention. Ces événements ont attiré l'attention des régulateurs, notamment l'autorité financière britannique qui a émis un avertissement contre Pump.Fun.Pour l'avenir, Tweedale envisage de transformer Pump.Fun en une plateforme sociale concurrente des plus grands réseaux, où la majorité des revenus reviendrait aux utilisateurs et créateurs. "Imaginez Instagram ou TikTok, où tout serait investissable", explique-t-il. Une vision ambitieuse qui pourrait redéfinir l'économie des médias sociaux, même si le chemin pour y parvenir reste à tracer. Selon les estimations, la plateforme pourrait générer plus d'un milliard de dollars de revenus en 2025, plaçant cette start-up apparemment loufoque parmi les acteurs majeurs de la tech.